26-12-1936 : Schiller, Fiesco
Samedi 26 décembre 1936
Première de Die Verschwörung des Fiesco zu Genua de Friedrich Schiller
Die Verschwörung des Fiesco zu Genua (La conjuration de Fiesco à Gênes), seconde pièce de Friedrich Schiller (après Les brigands) fut créé au Hoftheater de Bonn en 1783. Cette tragédie en 5 actes (9 tableaux) se déroule dans la Gênes des Doria en 1547.
La représentation de la pièce dans la grande salle du Neues Stadttheater de Tepitz-Schönau, au lendemain de noël 1936, se voulait festive et avait été bien préparée. Une musique de scène ponctuait le spectacle, avec une ouverture (un poème symphonique de Liszt) et des morceaux choisis de Berlioz et de Liszt pour souligner les moments forts de l’action. Fritz Kennemann avait fait la mise en scène, Walter Jacob avait choisi les musiques, Arno Bosselt et Richard Zikesch avaient fait les décors, Mizzi Popp avait réglé les mouvements de foule (nombre de figurants venant du corps de ballet). Il y eut deux entractes, après les 5ème et 8ème tableaux.
La pièce montre la préparation et l’exécution d’une conspiration contre le pouvoir du vieux Andrea Doria (joué par Friedrich Kühne) et surtout contre son neveu tyrannique, aux portes du pouvoir, Gianettino Doria (incarné par Walter Jacob) qui a un confident, Lamellino (Rudi Wiechel). Le fervent républicain Verrina (Fritz Kennemann) est l’âme de la conspiration. Autour de lui se groupent, pour des raisons diverses, Sacco (Kurt Walldorf) qui veut racheter ses fautes passées, Calcagno (Ernst Wagner) qui convoite la femme de Fiesco Leonore (jouée par Christl Raenz), Bourguigno (Rolf Schneider), fiancé de la fille de Verina Bertha (Editha Hille) et enfin Fiesco (Jack Mylong-Münz) qui semble le plus hésitant et le plus apolitique, ayant des relations avec la sœur de Gianettino Doria, la comtesse Julia (Léonie Dielmann),. Verrina se méfie de lui, soupçonnant en lui des velléités dictatoriales.Gianettino Doria voit lui aussi une menace en Fiesco et tente de le faire assassiner par le chef de la garde, le maure Moulay Hassan (Viktor Saxl), mais ce dernier trahit Gianettino pour Fiesco. Celui-ci est ainsi en position de mener un coup de force. Verrina, qui soupçonne de plus en plus Fiesco de vouloir non pas la république mais le pouvoir, confie à Bourguigno son intention de supprimer Fiesco dès que l’insurrection aura réussie. La personnalité de Fiesco, qui rêve de plus en plus au titre de duc et à incarner la grandeur de Gênes, semble justifier le point de vue de Verrina à mesure que l’action avance.
Vient le grand jour. L’insurrection réussit. Le jeune Bourguigno tue Giovanni Doria. Andrea Doria s’enfuit. Leonore, qui veut participer, s’habille en homme et descend en ville avec sa servante Arabella (Tony Eydt); elle tombe sur le cadavre de Giovanni Doria et, d’enthousiasme, lui prend sa cape pourpre et la revêt. Fiesco, qui la voit courir, la prend pour un partisan de Doria en fuite et l’abat. Quand il s’aperçoit qu’il a tué sa femme, il est profondément affligé mais il se reprend vite pour « accomplir son destin ».
De fait, tout Gênes est bientôt prête à reconnaitre Fiesco comme nouveau duc. Mais Verrina attire Fiesco près de la mer. Ils parlent. Verrina supplie Fiesco de renoncer au pouvoir personnel. Il l’en supplie à genoux. En vain. Alors Verrina pousse Fiesco dans la mer où celui-ci, entrainé par sa grande cape pourpre, se noie. Surviennent alors d’autres conjurés avec la nouvelle qu’Andrea Doria est de retour. Ils demandent où est Fiesco; Verrina répond: « Il s’est noyé, on l’a noyé si vous préférez. Je vais chez Doria ».
On put lire dans Abend : « … Fritz Kennemann prouva son talent pour donner de la force aux scènes en les éclairant de l’intérieur et leur donner une articulation naturelle convaincante. La performance du metteur en scène trouva un complément de valeur dans le commentaire musical qui ne s’est pas limité aux changements de scènes mais a souligné les temps forts de l’action. La musique d’accompagnement avait été méticuleusement choisie par Walter Jacob dans Liszt et Berlioz et a été idéalement interprétée par Herbert Weisskopf. Jack Mylong-Münz a montré avec son Fiesco un très grand art interprétatif (…) ». Après avoir loué l’interprétation de tous les rôles majeurs, le critique conclut: « Pour les rôles féminins, ils ont été parfaitement joués à part celui de Julia, interprété par Leonie Dielmann: Schiller demande justement un capacité de parole toute autre que le théâtre social moderne. La même chose pourrait être dite pour quelques petits rôles, sans toutefois altérer la magnifique impression d’ensemble.«