06-02-1932 : Richard Strauss, Salome
Samedi 6 février 1932
Première de Salome, opéra de Richard Strauss
La soirée du 6 février 1932, celle de la Première de l’opéra de Richard Strauss Salome, fut l’une des plus mémorables que la grande salle du Neues Stadttheater ait connue : les critiques la considérèrent comme « sans doute la plus belle soirée d’opéra jamais vue à Teplitz« .
Le livret de Salome (drame en un acte de Hedwig Lachmann), est directement inspiré de l’œuvre d’Oscar Wilde. La création de l’opéra eut lieu fin 1905 à Dresde. L’action se situe au début de l’ère chrétienne et se déroule au palais du roi Hérode. La nuit, sur une terrasse du palais, Salomé, belle-fille d’Hérode, est observée avec passion par Narraboth, capitaine de la garde. Jochanaan (Jean-Baptiste), prophète, est emprisonné dans une citerne pour avoir diffamé Hérode. Il proclame l’arrivée de Jésus, mais son appel rencontre l’incompréhension des gardes. Salomé entend le prophète. Elle parvient à convaincre les gardes de le faire sortir afin de le voir. À la fois fascinée et apeurée par ses prophéties, Salomé se prend de passion amoureuse pour cet homme. Narraboth ne peut supporter la scène et se tue à l’aide d’un poignard. Jochanaan est reconduit dans la citerne. Hérode, Hérodias (sa femme) et la Cour sortent sur la terrasse. Ils y trouvent Salomé et le cadavre de Narraboth. Hérode tente de distraire Salomé tandis que la voix du prophète retentit, s’en prenant à Hérodias. Une controverse s’ensuit entre celle-ci et Hérode tandis que Jochanaan annonce la venue du Messie. Hérode supplie Salomé de danser pour lui, promettant de réaliser n’importe quel vœux en récompense. Celle-ci finit par accepter, au grand dam de sa mère. Salomé exécute la « danse des sept voiles ». Hérode est subjugué, mais Salomé exige ensuite comme prix la tête de Jochanaan. Après avoir refusé, puis tenté de réduire son exigence, Hérode finit par céder et le bourreau descend dans la citerne. Il ressort, brandissant la tête du prophète dont Salomé s’empare. Elle lui parle et finit par baiser les lèvres tant désirées. Hérode, horrifié, donne l’ordre de tuer Salomé.
La production teplitzoise, dirigée à l’orchestre par Theodor Wünschmann, était mise en scène par Hans Robert, en invité. Ce dernier avait accomplit une longue carrière de basse lyrique, débutée à Klagenfurt en 1904 et poursuivie à Lübeck, à Coblence et enfin durant plus de 15 ans à l’opéra de Cologne dont il avait été le chanteur vedette. Il y avait notamment incarné Timur lors de la création mondiale de Turandot. Depuis sa retraite de chanteur, en 1930, il se consacrait à la mise en scène d’opéra. La distribution se révéla idéale: Herodes était incarné par le grand ténor tchèque Otto Macha, dont le tétrarque avait déjà été le rôle emblématique au Deutsches Theater à Prague, Herodias était chantée par la mezzo Hedda Grab, Salomé par la soprano Minna Krasa-Jank (qui laissa toutefois place à la danseuse professionnelle Grete Gronner pour la danse des sept voiles), Jochanaan par le baryton Emil Wolfgang Ritz, Narraboth par le ténor Mano Belina. Le succès retentit jusqu’à Prague, où, selon le Prager Abendblatt « L’opéra à Teplitz a connu, avec Salomé, son plus grand soir. Sous la direction du chef Wünschmann et la régie de Robert, la représentation fut mémorable. Minna Krasa-Jank fut étonnamment bonne en Salomé, Otto Macha, Hedda Grab et Wolfgang Ritz à leur meilleur. »